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Le premier chapitre de « De l’eau dans la bouche »

Une héroïne face au
Chemin de l’Amazone
Accompagnerez-vous Emi dans la lecture
d’un e-mail que reçoit cette jeune-fille ?
Emprunterez-vous avec elle ce Chemin de l’Amazone ?
Entre secrets, épreuves et combat d’une vie, mon second roman traite de la résilience, du courage, du soutien familial ou comment vivre et non survivre après une agression sexuelle. Découvrez le premier chapitre ci-dessous.

« Enfin seule. OK, Zéphyr reste avec moi ce week‑end, mais il ne compte pas. C’est grâce à notre chat fétiche que je dois garder la maison, et ainsi j’ai l’extrême chance d’avoir deux jours sans mes parents. Le rêve quand on a presque 16 ans, non ? Je vais pouvoir traîner, manger ce que je veux, où je veux, tant que je ne laisse aucune trace, mais je ne m’inquiète pas, Zéphyr m’aide beaucoup. Ce chat est un glouton sur pattes sans jamais grossir. Je me demande comment il fait. Nous avons le même âge, enfin à une année près. Dans une semaine, j’aurai vraiment 16 ans et lui 17 ! En années chat, il devrait avoir… Je ne sais plus, mais c’est un beau Persan gris pâle, à poils longs.
Ma mère m’a expliqué leur voyage, je ne sais où. J’avoue, je n’ai pas tout écouté, juste qu’ils partaient vendredi après le dîner et rentraient dimanche en fin d’après-midi. Bref, selon ses demandes, je suis responsable de notre chat et de ses croquettes, ainsi que de fermer tous les volets la nuit et d’aérer la maison le jour. Loin d’être un château, notre mignonne villa n’a que dix fenêtres sur un plain-pied. Je devrais y arriver.
Je me lève après une énooorme grasse matinée. Quel bâillement à mon réveil ! Seule et ravie avec Zéphyr aux pieds. Croquettes OK. Volets, j’ai fait mon tour. Aération en cours. Vive le petit déj’ à 13 heures !
Programme du samedi : flemme, paresse, chiller. C’est fou comme notre langue a des synonymes pour décrire l’envie de ne rien faire.
Tartines, gâteaux, un verre de jus d’orange, tous engloutis, fenêtres refermées, je file dans ma chambre et hop, saut dans mon lit. Retour dans mon espace préféré : sous mes draps. Toujours Zéphyr au pied de mon lit dans son panier molletonné. Mon adorable félin, au pelage soyeux, reste aussi un grand passionné de confort.
On se comprend tous les deux, presque élevés ensemble. Quand j’étais toute petite, je savais marcher, mais je préférais rester la reine du quatre pattes. J’allais plus vite pour mon grand jeu : courser Zéphyr. Ce chat n’a jamais été méchant avec moi. Il préférait la fuite ou sauter sur un meuble, devenant à mon grand regret inatteignable. Je me souviens encore de son regard persan sur le dossier du canapé. Et même si je savais me relever, ce n’était plus le même jeu.
Une fois, il n’a pas fui et j’ai pu toucher sa belle queue touffue. Sauf que j’ai commencé à tirer dessus. Et Zéphyr aime ses poils. Pour la première fois, il fit demi‑tour et droit dans les yeux, il feula. Puis se retourna, mais il ne prit pas la fuite. Regard espiègle, petite main décidée, j’attrapai à nouveau sa queue poilue et douce. Feulement clair et gifle directe ! Je me mis à hurler. Ma mère se jeta sur moi, craignant de me retrouver en sang au vu du coup de patte de Zéphyr sur mon visage. Or, rien, pas une égratignure. Aucune griffure. Il s’était fait respecter : « J’ai dit non, c’est non ! »
Le message fut limpide, à tel point que quatorze ans me séparent de cette scène et je m’en souviens encore. Je ne l’ai plus jamais embêté. Il ne m’a jamais griffée et pourtant, qu’est‑ce qu’on a joué ensemble ! Mais depuis quelques jours, il semble plus fatigué. Lui aussi a fait la grasse mat’ avec moi. Alors je lui propose de venir sur mon lit, ce qu’il fait dès mon appel. Je suis fan de son ronronnement. Zéphyr est mon confident, ma peluche vivante avec son caractère et un amour de matou. C’est Mon Chat !
Tranquille, posée, j’ouvre mon ordinateur portable. C’est l’été. La rentrée est loin. Je profite de mes vacances en totale solitude. Heureuse, j’ouvre mes mails. Rien faire ne signifie pas se couper de tout. Ma messagerie m’indique un nouveau mail.
Je ne connais pas l’envoyeur, mais l’objet est clairement pour moi : « Emi, lis-moi s’il te plaît ». J’ouvre. Il ne comporte qu’un PDF sans rien d’autre, ni signature ni mot. Un fichier unique dans un mail inconnu dans ma boîte la plus privée que j’aie créée. Jamais je n’utilise cette adresse pour créer un compte. Elle n’est réservée qu’à mes amis proches, aux gens que j’aime. Pourquoi ne reconnais‑je pas cet expéditeur alors qu’il connaît mon prénom ? Je m’étonne. Pourtant, ce mail n’a pas d’adresse fantaisiste et l’antivirus installé par mon père ne m’a rien signalé. Alors piquée par la curiosité, je clique dessus et le PDF s’affiche.
Je bondis hors du lit, mon ordinateur valsant sur le côté comme Zéphyr, pris par surprise. Fixant cette première page sur mon écran de travers, je reste figée. Et ces quelques mots me glacent :
Comment survivre à un viol
J’en tremble, mais je ne peux détacher mon regard :
Il a pris mon corps
Il n’aura pas mon âme.
Il m’a marquée
Je me tatouerai.
Il m’a blessée
Je cicatriserai.
Il m’a rabaissée
Je me relèverai.
Il croit gagner
Je le crucifierai.
Avec de l’aide et du courage
J’arpente le Chemin de l’Amazone.
Je n’ai pas le choix
Il ne m’a pas laissé le choix.
Mais qu’est‑ce que c’est ce mail ? »
Note de Sarah Ohana :
Pour toute aide face à un viol ou une agression sexuelle, rendez-vous sur le site du Gouvernement pour plus d’informations.